Environ 27 millions d’électeurs se sont rendus aux urnes sur les plus de 61 millions de votants enregistrés dans le pays le plus peuplé du monde arabe, selon la même source.La réforme de la Constitution permet la prolongation de la présidence du président Abdel Fattah al-Sissi : son deuxième mandat va ainsi passer de quatre à six ans, portant son terme à 2024. L’ex-maréchal, aujourd’hui âgé de 64 ans, pourra se représenter à un troisième mandat de six ans, lors de l’élection de 2024. Il pourra donc se maintenir jusqu’en 2030. Il avait été élu président en 2014 avec 96,9% des voix, un an après avoir renversé avec l’armée, à la faveur d’un mouvement populaire, le président islamiste Mohamed Morsi. Il a été réélu en 2018 à 97,08%.Dans le même temps, la révision constitutionnelle permet le contrôle du chef de l’Etat sur le système judiciaire, avec un pouvoir de nomination des chefs de juridiction. La réforme octroie également un pouvoir politique à l’armée, pilier du régime de M. Sissi. “Ces amendements constitutionnels renforcent l’exécutif et l’armée au détriment d’un système judiciaire et législatif affaibli”, a expliqué à l’AFP Mai el-Sadany, responsable des questions juridiques au groupe de réflexion The Tahrir Institute for Middle East Policy (Timep), basé à Washington.
Vote contre nourriture“Tous les moyens ont été déployés pour que la population se déplace massivement cocher la case ‘Je suis d’accord’ sur les bulletins de vote. Les médias, aux ordres du pouvoir, battent campagne exclusivement pour le oui”, rapportait Le Monde avant le scrutin. Le quotidien français ajoutait : “La complexité du projet” a été éludée et résumée “à un simple choix dans les débats télévisés : permettre à M. Sissi de prolonger son mandat (…), c’est faire le choix de la stabilité. Les amendements les plus consensuels, comme les quotas réservés aux femmes (…), sont mis en avant.”Le Guardian rapporte avoir visualisé des vidéos filmées sous le manteau montrant des officiels en tenue civile “forçant les électeurs” à aller voter. “On ne leur dit pas ce qu’ils doivent voter. On n’a pas besoin de le leur dire”, commente un jeune homme resté anonyme, chargé de battre campagne pour le oui.Les deux journaux rapportent que de la nourriture a été distribuée aux personnes prouvant qu’elles avaient voté (en l’occurrence en montrant un doigt trempé dans de l’encre rose). Information confirmée par l’AFP. “Les gens sont pauvres et prennent tout ce qui peut les aider à supporter cette situation. Beaucoup de personnes que je connais se sont rendues aux bureaux de vote pour avoir un colis de nourriture, parce que le ramadan approche et les prix sont très élevés en ce moment”, témoigne l’une d’entre elles dans le Guardian. “Tous ceux que je connais et qui sont allés voter se fichent pas mal du référendum, tout ce qu’ils veulent, c’est le colis” , raconte un chauffeur de taxi cité par Le Monde.
“Le référendum s’est déroulé dans un environnement tellement injuste et non libre que ses résultats ne peuvent prétendre à une quelconque légitimité”, a dénoncé Michael Page, directeur adjoint de l’ONG Human Rights Watch pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient, cité par l’AFP.